Le management peut-il se passer d'autorité ? Entre management bienveillant et leadership toxique, où se situe la juste mesure ?
Ces questions soulèvent de nombreux débats dans le monde de l'entreprise. L'autorité, souvent perçue comme une notion rigide et dépassée, semble s'effacer devant le management bienveillant et participatif. Mais est-ce vraiment le cas ? Est-ce vraiment dans l’intérêt de tous ?
L'autorité est-elle une composante indispensable du management ou peut-on s'en passer ? Pouvoir, supériorité hiérarchique ou charisme, quelle est la véritable essence de l'autorité ?
Dans cet article, nous allons explorer cette notion complexe et ses implications dans le monde du travail, en nous interrogeant sur la manière d'exercer ou d'accepter l'autorité en fonction de sa position dans l'entreprise, et sur la façon d'asseoir son autorité sans devenir pour autant un tyran.
L'autorité est liée à l'étymologie latine du mot "auteur", et signifie être à l'origine de quelque chose.
Mais si l’autorité est un mot que la plupart des gens classent dans un registre peu flatteur c’est qu’il fait référence directe aux relations parents/enfants qui furent notre première expérience de l’obéissance et de la contrainte.
Dans le monde du travail, l’autorité est la capacité à décider et à commander. Elle ne doit pas être confondue avec l'autoritarisme, qui implique un contrôle excessif et une absence de liberté pour les collaborateurs.
L'autorité en management peut prendre différentes formes, allant du manager libéré au despote autoritaire.
Le manager libéré exerce son autorité en convainquant ses collaborateurs et en favorisant la délégation et l'initiative. Il est conscient de ses limites et partage les responsabilités.
Le leader bienveillant exerce son autorité en montrant l'exemple et en communiquant avec ses équipes. Il dessine un cadre clair et bienveillant et instaure un système de feedback.
Le despote autoritaire, quant à lui, exerce son autorité par la contrainte et la peur. Il se retranche derrière sa position hiérarchique et est craint plutôt qu'admiré. Ce type de management entraîne une mauvaise ambiance, une démotivation et un turnover élevé.
💡 La nuance entre les trois façons d'exercer l'autorité peut parfois être difficile à distinguer, ce qui rend la tâche du manager encore plus complexe. En effet, certains managers peuvent passer de l'une à l'autre de ces approches sans vraiment s'en rendre compte, ce qui peut rendre leur perception par leur équipe plus compliquée et créer de la confusion.
Jusqu’ici tout va bien, tout semble clair. Il existerait donc différents types d’autorité dont certains seraient à éviter
→ Mais depuis quelques décennies nous assistons à une remise en cause du modèle autoritaire classique - le chef décide, les salariés exécutent - dans le monde professionnel et la société.
Dans la société, la montée de l’individualisme, les mouvements sociaux, les révolutions technologiques et les évolutions culturelles ont contribué à remettre en question les structures traditionnelles d'autorité. Les individus sont de plus en plus critiques envers les institutions et les figures d'autorité, et privilégient l'autonomie, la responsabilité individuelle et la prise de décision collective.
→ Dans le monde professionnel également les nouvelles générations ont tendance à privilégier les modes de management participatifs et horizontaux, plutôt que les structures hiérarchiques traditionnelles.
→ Les pratiques collaboratives, l'intelligence collective et la transparence sont de plus en plus valorisées. L'autorité est perçue comme un frein à la créativité, à l'innovation et à la motivation. De nombreuses entreprises ont donc adopté des formes de management plus souples et plus inclusives, où l'autorité est partagée et où les collaborateurs sont encouragés à prendre des initiatives et à s'impliquer dans les décisions.
“L'autorité, dans l’entreprise comme ailleurs, implique une relation dissymétrique d’obéissance acceptée comme légitime. Celle-ci ne va plus de soi à l’heure de la crise des figures traditionnelles et des repères symboliques de l’autorité” Jean-Pierre Le Goff - Autorité, management et modernisation
Mais alors, où le problème ? Ce moindre usage volontaire de l’autorité sous prétexte de répondre aux attentes des salariés a abouti à un management paradoxal : sous couvert d’autonomie, de responsabilité, d’auto-évaluation, d’implication, beaucoup de salariés se sentent esseulés et livrés à eux-mêmes.
Résultat ? Dans le monde professionnel (et dans la société en général), cette absence de direction claire provoque un potentiel délitement du collectif et du lien social ou de la culture d’entreprise.
Si les managers sont de moins en moins reconnus et respectés, les individus sont de plus en plus enclins à se référer à eux-mêmes plutôt qu'à des normes collectives.
Les sociologues parlent alors de rapports “interindividuels”. Cette perte de repère entraîne une érosion des valeurs et des normes sociales. L’explosion du “développement personnel” en tant que discipline et la dégradation du niveau de la santé mentale des salariés en sont deux symptômes évidents.
“On peut ainsi se demander si les appels réitérés à l’autonomie, à la responsabilité et à la participation de tous ne véhiculent pas une ambiguïté fondamentale, celle d’une dénégation de la relation inégalitaire constitutive des relations d’autorité. Pourquoi faudrait-il laisser croire ou faire comme si tout le monde était ou devait être autonome et également responsable ?” Jean-Pierre le Goff
Pour faire simple, je dirais que les évolutions du management ont entraîné une attention accrue portée à l'individu, une remise en cause de l'autoritarisme et des cloisonnements bureaucratiques, ainsi qu'une volonté de prendre en compte les idées des salariés.
Ces changements ont produit des résultats réels dans les entreprises, mais ils ont également donné naissance à une nouvelle rhétorique du management. Il est donc important de trouver un équilibre entre l'autonomie individuelle et les normes collectives, pour garantir un fonctionnement harmonieux de nos entreprises.
Et peut-être nous faut-il songer à clarifier et préciser les concepts que nous manipulons parfois sans y prêter attention. Le flottement autour des mots comme « leadership », « animation d’équipe », « coordination », « responsabilité », sans autre mise en contexte ne sont d’aucun secours pour les managers.
Si l’on essaye de revenir aux fondements de ce qu’est le salariat, il ne fait aucun doute que l'autorité en entreprise repose sur les pratiques de gestion des ressources humaines, qui ont leur origine dans la relation employeur-employé et dans le contrat de travail. Et oui c’est comme ça ! 🙂
Ce contrat définit la subordination de l'employé à l'employeur, et précise les limites de l'autorité de ce dernier.
→ Il est donc important de légitimer cette autorité et les styles de leadership au niveau le plus bas de la hiérarchie, pour garantir un fonctionnement harmonieux de l'entreprise.
Pour aller plus loin, c’est même lorsqu'il n'y a plus d'autorité qu’il l y a un risque d'autoritarisme. En l'absence d'une autorité légitime, les plus forts ou les managers toxiques peuvent prendre le dessus et imposer leur volonté par la force ou la contrainte.
Cela peut entraîner une insécurité et des comportements de soumission ou de rébellion chez les collaborateurs. En revanche, une autorité saine rassure, protège et fédère les équipes. Elle est basée sur le respect, la confiance et la communication, et permet de créer un environnement de travail sain et productif.
Bien que les pratiques de management aient évolué, il est toujours nécessaire de diriger les équipes, et il est manipulateur de laisser entendre le contraire. Il ne s'agit pas de revenir aux pratiques anciennes, mais d'assumer une position d'autorité tout en reconnaissant la légitimité des différences, des contradictions et des conflits.
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